Orage mécanique et canicule
Jour 24
(28 juin)
Au départ d’Avignon ce matin, quatre cyclistes nous font la surprise de prendre la route avec nous, ils ont une vingtaine d’années. Certains ont fait des études, d’autres non, ils viennent de régions différentes et ne se sont pas concertés. Leur détermination nous encourage ! En choisissant de suivre le Tour Alternatiba pendant leurs vacances, chacun d’entre eux espère attirer l’attention de leur famille et amis et montrer que les enjeux climatiques sont loin de laisser la jeunesse indifférente ou désarmée. Charlotte, qui organise l’arrivée du Tour et le Village des alternatives de Grenoble, a également rejoint l’équipe. Elle monte sur une triplette pour la première fois mais apprendra bien vite le langage que nous avons mis en place pour nous coordonner !
Pour rejoindre Orange, faute de guide, nous choisissons de faire confiance au GPS. Ce dernier nous entraîne cependant sur des chemins bien cabossés… petite et grande triplettes font la grimace. Malgré nos précautions, la chaîne de la petite triplette fini par céder à une quinzaine de kilomètres de l’étape du midi. Pour ne pas retarder notre arrivée et ménager le vélo, le camion logistique vole à notre rescousse et embarque la triplette. Les cyclistes quant à eux font du stop. La rencontre avec les automobilistes qui s’arrêtent est un moment de partage intéressant, c’est l’occasion de découvrir des chemins de vie différents des nôtres, de mettre en perspective nos perceptions de la réalité… et de leur suggérer quelques alternatives à adopter, on ne se refait pas 😉
En arrivant à Orange, nous sommes accueilli en petit comité par les fondateurs du Café-jardin, une élue écologiste et quelques amis investis dans la vie associative locale, dont une prof d’Esperanto ! Les mouvements alternatifs et militants semblent discrets à Orange. Cela dit, bénéficier de la bienveillance des locaux est un vrai plaisir, tout comme découvrir les initiatives qu’ils portent, parfois à bout de bras, et d’observer que leur envie d’agir près de chez eux reste forte. Ils nous ont préparé un bon casse-croûte savouré à l’ombre des arbres de la place de la République et n’ont pas hésité à soutenir le Tour en échange de nos super livrets « Alternativez-vous », T-shirts, badges et autocollants. Notre pause déjeuner nous a par ailleurs permis de réparer la chaîne de la petite triplette et, les mains noircies d’huile, nous avons repris la route avec les deux tandems jusqu’à Pierrelatte.
Alors que nous étions en pleine vélorution autour de la place du Champs de Mars, en passant par le lac de Pierrelatte, aux côtés de Gérard, notre hôte coordinateur des Amap de la région, nous avons pris plaisir à interloquer le public. Au passage des tandems chantant « on avance, la transition arrive, on est nombreux à taffer dur pour les alternatives, de Pierrelatte à Paris on s’mobilise ! » les têtes des vacanciers faisant bronzette se dressaient, celles des plongeurs sortaient de l’eau, les automobilistes eux, ralentissaient. Puis nous nous sommes retrouvés au Hang’Art, un lieu d’accueil apaisant pour les gampeurs… oui, vous avez bien lu, les gampeurs, ceux qui font du gamping !
Jour 25
(29 juin)
Il faut croire que nous avions le cœur à la balade en nous réveillant ce matin là. Il nous aura en effet fallu un bon moment avant de comprendre que les jolis panoramas que nous observions le long de la Via Rhona n’étaient en réalité pas de si bon augure… nous avions pris la piste dans la mauvaise direction ! Il paraît qu’il y a des jour avec, et des jours sans. Une fois le chemin de Montélimar retrouvé, voilà que le dérailleur et la chaîne de la grande triplette font obstacle à la progression d’une partie de l’équipage. Quelques kilomètres plus loin, alors que la petite triplette s’engage dans l’ascension d’une colline, d’inquiétants petits bruits se font entendre. Le doute plane : faisons nous une bonne utilisation de ces vélos atypiques, sommes nous suffisamment précis lors des sessions d’entretien ? Depuis quelques jours, certains membres de l’équipe présents depuis le départ du Tour, le 5 juin, ont pris un temps de repos et passé le relais. Mais avons nous donné assez d’importance à la transmission du savoir faire ?
À la pause déjeuner, le moral n’était pas aussi brillant que le soleil. Heureusement, au sein de notre petit groupe en mouvement, solidarité et détermination demeurent, infatigables et permanentes ! En souvenir de notre belle soirée d’accueil à Marseille nous nous sommes alors mis à chanter pour regagner du courage “On lâche rien” ! Nous avons alors pu porter secours à la petite triplette qui a gentiment accepté de repartir alors que sa grande sœur restait en convalescence pour l’après midi. Accompagnés de François, notre hôte du soir, élu local et passionné de vélo, nous avons pris la route de Crest. Sa présence est rassurante, pas de doute sur la direction à prendre !
Cet après midi nous avons continué à parcourir la Via Rhona, effleuré la centrale nucléaire de Cruas, cohabité avec les poids lourds sur la N7 et finalement retrouvé un petit groupe de copains à l’écosite de Crest pour une vélorution festive mobilisant une quarantaine de personnes.
Le soir venu, un nouveau moment d’échanges chaleureux et enrichissants a eu lieu. Habitants curieux et représentants d’une dizaine d’associations locales (Conversation carbone, Zimboom26, Autour du cycle, la Dryade et le Réseau pour les Alternatives Forestières, les collectifs Stop Tafta et Stop au Gaz de Schiste, les Hormones de décroissance, etc.) se sont rencontrés et ont fait connaissance avec nous, autour de discussions relatives à la transition et aux alternatives, complétées par la conférence du Tour, animée ce soir là par Barth et Sabrina. Dans la salle entre autres, les porteurs du projet “décroissants de thunes” qui proposent la normalisation du verbe “gratuiter”, mais surtout un festival de la gratuité dans le Diois en juillet, mais aussi des habitants de la commune de Saillans (décrite ici par Basta!! ), acteurs d’une forme de démocratie participative pour l’heure hors norme où les décisions municipales se partagent à des dizaines et par commissions participatives de citoyens !
Jour 26
(30 juin)
Échaudés par les péripéties de la veille et profitant d’un cadre accueillant à Crest, chez Gabriel, nous avons consacré notre matinée à effectuer des réparations. En nous aidant à manier le chalumeau, celui-ci nous a permis d’entreprendre des travaux plus conséquents, et ainsi de continuer notre Tour des alternatives sereinement !
L’après midi nous avons mis le cap sur Valence, en écoutant notre guide nous parler du projet de la Biovallée dans le pays Crestois, et d’autres parties de la Drôme. Alors que nous nous entretenions avec la presse locale et faisions part aux vélorutionnaires valentinois des consignes de sécurité à appliquer lors de nos déambulations, nous avons découvert un véhicule pour le moins hors du commun : le vélomnibus !
Ce moyen de transport peut porter jusqu’à 20 passagers, mis à contribution en pédalant ensemble pour faire avancer la machine. A côté de ce très bel exemple d’alternative hautement performant sur le plan humain et écologique, la quadruplette se sentait piquer la vedette !
Puis la soirée s’est déroulée à la MJC (Maison des jeunes et de la culture) de Porte-lès-Valence, ce qui nous a permis de rencontrer un public nouveau. Organisée notamment par la Coordination de la nouvelle éducation populaire, CEN, cette rencontre a été l’occasion d’évoquer la nécessité de se réapproprier et de relocaliser la transmission de savoirs pour que personne ne soit laissé à la marge, ou encore d’explorer des sujets comme la démocratie directe et les méthodes d’émancipation collective, face au poids d’un système qui trop souvent nous paralyse.
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